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SUIVI DE LA RÉFORME DE L’ALTERNANCE

M. Di Mattia – Monsieur le Ministre-Président, au printemps dernier, les gouvernements wallons, bruxellois et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ainsi que le collège de la Commission communautaire française (COCOF), se sont accordés sur une note d’orientation quadripartite relative à la méthode à construire en vue d’un renforcement transversal de l’enseignement qualifiant et de la formation professionnelle. Cette note a été à l’origine d’un état des lieux de la filière.


Dans ce cadre, neuf comités de pilotage émanant des quatre entités compétentes pour la formation en alternance se sont réunis entre le mois de juin 2022 et aujourd’hui pour établir une feuille de route. Celle-ci revêt la forme d’un rapport avalisé par les administrations, les opérateurs et les partenaires sociaux. Ce rapport devait faire l’objet d’une présentation au gouvernement dans le courant du mois de décembre.


Monsieur le Ministre-Président, pouvez-vous nous confirmer que ledit rapport a bien été présenté au gouvernement avant la trêve parlementaire? Dans la négative, quelles sont les raisons qui expliquent ce retard? Si cette présentation a bien pu avoir lieu, pourriez-vous faire le bilan des discussions tenues entre les parties au cours des derniers mois et nous esquisser les principales conclusions de ce rapport? Comment ce rapport éclaire-t-il la vision d’avenir de l’alternance des partenaires intergouvernementaux? Quelles sont les prochaines étapes annoncées de la réforme?


M. Jeholet – Monsieur le député, vous le savez, ce dossier me tient particulièrement à cœur. Il avance bien, mais pas suffisamment vite à mes yeux. Comme vous le rappelez, au printemps dernier, les gouvernements de la Région wallonne, de la Région de Bruxelles-Capitale, de la Fédération Wallonie-Bruxelles, et le Collège de la Commission communautaire française (COCOF) ont adopté une note d’orientation quadripartite relative à la méthodologie à adopter en vue du renforcement transversal de l’enseignement qualifiant et de la formation professionnelle, en particulier de l’alternance.


Fondée sur la volonté commune des gouvernements d’avancer, la note d’orientation propose une approche méthodologique visant à définir et initier le déploiement d’une feuille de route transversale, dans le but de repenser structurellement les dispositifs et le paysage de l’enseignement qualifiant et de la formation professionnelle, en particulier l’alternance, et répondre ainsi aux défis de la Wallonie et de Bruxelles. Je le répète depuis longtemps, nous avons besoin d’une réforme systémique.


L’approche méthodologique repose sur deux axes. Le premier se fonde sur une approche à court terme visant à identifier et à déployer un plan d’action pour apporter une réponse rapide aux problématiques des apprenants, des opérateurs et des entreprises. Dans ce cadre, notre gouvernement et le Collège de la COCOF ont d’ores et déjà approuvé une première note opérationnalisant les actions prioritaires identifiées à court terme. Le gouvernement wallon devrait aussi approuver la note prochainement.


Le deuxième axe repose sur une approche à moyen et long termes et consiste à réaliser un état des lieux transversal de l’enseignement qualifiant et de la formation professionnelle, en particulier de l’alternance, afin d’établir une compréhension factuelle commune du point de départ. Je m’étendrai plus spécifiquement sur ce deuxième axe qui fait l’objet de votre question. La réalisation de l’état des lieux a fait l’objet d’une convention-cadre entre les trois gouvernements, le Collège de la COCOF et l’ASBL Agir pour l’enseignement (APE) mandatée à cet effet.


Les travaux ont été menés entre les mois de mai et de novembre 2022, sous l’égide d’un comité de pilotage composé des représentants des ministres compétents et de l’ASBL APE, qui s’est réuni à dix reprises. Afin d’atteindre les objectifs fixés, les travaux ont porté sur l’analyse de données, issues tant de l’espace francophone que de l’étranger, la réalisation d’enquêtes par questionnaires, la tenue de plus de 250 entretiens individuels ou en petits groupes ou encore l’organisation de 19 groupes de discussion: la preuve que le travail avance.


Avant de présenter le rapport final aux différents gouvernements, il a été décidé que le premier projet de synthèse fasse l’objet de séances d’approfondissement et de relectures avec les représentants des différents acteurs de l’écosystème de l’enseignement qualifiant et de la formation professionnelle. Ces séances, qui se sont déroulées entre la mi-novembre et le mois de décembre, ont permis d’aboutir à la version finale du rapport qui sera soumise à chaque entité au cours des prochains jours.


La réalisation de l’état des lieux a permis d’identifier des constats et des messages clés relatifs, d’une part, à l’enseignement et la formation en alternance et, d’autre part, à l’enseignement qualifiant et à la formation professionnelle en général. En ce qui concerne l’enseignement et la formation en alternance, l’état des lieux constate que le développement de l’enseignement en alternance demeure un objectif répété et partagé par les gouvernements et collèges francophones depuis plus de quinze ans. Cependant, en dépit de cette volonté politique, ce type d’enseignement ne décolle pas et conserve une image négative de filière de dernier recours, plutôt qu’un premier choix positif et constructif. Elle ne représente par ailleurs aujourd’hui qu’une part minoritaire des apprenants en formation qualifiante et ne mobilise qu’une minorité des employeurs en Wallonie et à Bruxelles. La filière fait en outre face à un taux d’abandon et de décrochage élevé en cours de formation.


Les facteurs qui expliquent la difficulté de développer l’alternance sont multiples. Parmi les principaux obstacles à son développement dans notre Fédération figurent l’absence de consensus sur une vision partagée – qui représente l’objectif que nous poursuivons aujourd’hui –, son positionnement structurel dans les parcours d’enseignement et de formation qualifiants ainsi que le manque de connaissances des différents acteurs et l’absence de dispositif proactif d’orientation positive vers les formations en alternance. Plutôt qu’une complémentarité entre opérateurs, il y a souvent une concurrence qui ne profite à personne.


L’état des lieux a également permis de dégager une vue d’ensemble de l’offre d’enseignement qualifiant et de formation. Il s’avère que l’offre d’enseignement et de formation ne permet pas, en l’état actuel, de répondre systématiquement de manière efficiente aux besoins et aux attentes des entreprises.


Son pilotage, sa gouvernance, sa couverture géographique et son efficience ont également été identifiés comme des leviers potentiels majeurs d’amélioration. Dans le cadre d’une réponse à une question orale, vous comprendrez aisément que je n’approfondisse pas plus avant l’ensemble des constats du rapport, car le travail réalisé est tel qu’il ne peut être synthétisé. Sachez, d’ores et déjà, qu’il sera toutefois bientôt publié en ligne et mis à la disposition de toutes et tous dès son adoption par les gouvernements. J’y tiens particulièrement.


Après avoir milité pour son lancement auprès de mes collègues, je me réjouis que le travail initié ait permis de créer un consensus sur un état des lieux et une base de travail solides créant les conditions nécessaires à une réflexion prospective entre entités et au sein de chaque gouvernement. Je prétends qu’il s’agit d’une réforme systémique. Dans ce cadre, il est important de disposer d’un tel état des lieux pour ne pas se cantonner, parfois, à des a priori ou à une méconnaissance de certains aspects. Avec cet état des lieux et ce travail réalisé, nous sommes à même de poser un bon diagnostic, mais aussi de conduire les bonnes réformes et d’apporter les améliorations nécessaires pour faire de l’alternance une filière d’excellence et de qualité.


Pour autant, le rapport évoqué ne constitue pas un point final. Il doit en effet inciter les gouvernements à poursuivre leurs travaux. À titre d’exemple, il met notamment en lumière de nombreux défis propres à l’amélioration et au futur de l’enseignement qualifiant. On ne peut en effet pas considérer l’alternance de manière totalement indépendante de l’enseignement qualifiant. Ce rapport s’inscrit dans la continuité du Pacte pour un enseignement d’excellence et, plus spécifiquement, de l’avis n° 3 du Groupe central, qui appelait le gouvernement à se saisir des questions restées en suspens. En regard du calendrier de mise en œuvre du tronc commun, j’estime qu’il est temps d’entamer le travail d’organisation des trois dernières années de l’enseignement secondaire.


Le rapport souligne aussi la nécessaire amélioration de la coordination interfrancophone vis-à-vis des mécanismes de coopération entre entités, d’échanges de données, d’implication des secteurs et employeurs dans la formation initiale ou encore d’améliorations de l’orientation et du décrochage scolaire. Comme vous le constatez, les défis sont nombreux et, avec l’ensemble de mes collègues, je compte bien les relever. Dans ce cadre et à la suite de la demande des partenaires sociaux, la note qui sera prochainement soumise au gouvernement proposera la méthodologie afin de poursuivre les travaux. Le but poursuivi est d’améliorer l’alternance, l’enseignement qualifiant et la formation professionnelle dans l’espace francophone.


M. Di Mattia – Monsieur le Ministre-Président, on prend souvent les pays germanophones, voire dans certains cas les pays anglo-saxons, comme modèles, non seulement en matière d’insertion, mais aussi de participation à la vie des entreprises. Or, ces exemples sont le résultat d’un pacte global. Dans les années cinquante et soixante, des circonstances particulières ont eu pour résultat la création d’une véritable alliance entre le monde de l’entreprise et les besoins des apprenants.


J’ai posé la même question au ministre Willy Borsus sur le taux d’abandon en deuxième et troisième année d’alternance. Le travail réalisé par l’Institut de formation en alternance et des indépendants et petites et moyennes entreprises (IFAPME) et son homologue bruxellois en matière d’insertion est remarquable puisqu’ils réalisent 85 à 90 % d’insertion professionnelle. Cependant, de quelle insertion s’agit-il, quelles sont les conditions de stage et pourquoi enregistre-t-on autant d’abandons?


De plus, en étudiant les analyses, la responsabilité de l’abandon est attribuée dans 90 % des cas à l’apprenant. Or, comme dans un couple, les responsabilités sont souvent partagées. Vos propos, Monsieur le Ministre-Président, sont donc particulièrement précieux et je compte sur vous pour mettre le rapport en ligne. Je n’ai abordé ici qu’une infime partie du sujet. Il est très important que les partenaires sociaux soient associés à la réflexion pour que nous puissions répondre aux besoins des apprenants et tenir compte du tissu très riche des PME et TPE en Wallonie et à Bruxelles.


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