M. Di Mattia – Madame la Ministre, dans le cadre des missions de promotion qui sont aujourd’hui assurées par les fédérations provinciales du tourisme, les maisons du tourisme me font part de leurs inquiétudes quant à la nature non structurelle d’un recours aux appels à projets prévu dans le cadre de la réforme du Code wallon du tourisme comme nouvelle base du régime de subvention pour le développement d’actions de promotion.
Là où la maison du tourisme travaille aujourd’hui sur des plans d’action en connaissant l’enveloppe budgétaire prévue – donc en connaissance de cause – qui lui est octroyée par la fédération provinciale à laquelle elle est rattachée, l’automatisation des subventions vers des mécanismes ciblés au travers d’appels à projets thématiques revêt, pour un certain nombre de responsables sur le terrain, un caractère aléatoire qui n’entre pas en résonance avec le travail de planification et les politiques d’investissement mis en œuvre par les maisons du tourisme jusqu’ici.
En attente de la publication des arrêtés d’exécution, quelle réponse formulez-vous aux inquiétudes quant au caractère aléatoire de la mécanique d’appels à projets ? S’agit-il d’un outil qui serait complémentaire à une forme de subvention plus structurelle qui subsisterait, mais qui ne serait plus liée aux fédérations provinciales du tourisme ?
Comment allez-vous organiser pratiquement ces appels à projets récurrents ? Quels sont les délais envisagés pour permettre aux maisons du tourisme d’y répondre ? Quelles autres mesures envisagez-vous pour assurer la qualité des politiques d’investissement mises en œuvre par les maisons du tourisme sur la durée ? Je vous remercie d’ores et déjà pour les éléments de réponse.
Mme De Bue – Monsieur et Madame les Députés, je vais commencer par les questions sur l’Europe.
Au sujet de la coordination du Code wallon du tourisme avec la réglementation européenne, des représentants des administrations du tourisme de Wallonie, de Flandre, de la Communauté germanophone et de Bruxelles-Économie, ainsi que des attachés des trois Régions à la Représentation permanente auprès de la Commission européenne, se réunissent régulièrement depuis mars 2022. Ils ont ainsi pu appréhender tous les aspects du règlement européen, qui doit d’ailleurs toujours être approuvé par le Parlement. Leur travail se poursuit désormais sur la mise en œuvre technique du texte.
La future procédure d’enregistrement tiendra bien compte de la réglementation européenne. D’ailleurs, c’est déjà le cas puisque la procédure actuelle de déclaration respecte le principe majeur du règlement STR, short-term rentals. C’est-à-dire ne poser aucune entrave à la liberté d’entreprendre et inviter l’administration à procéder à des contrôles ex post et non ex ante du respect des conditions d’exploitation. Ce principe sera maintenu dans la procédure d’enregistrement du futur Code wallon du tourisme.
Concernant la possibilité d’utiliser le numéro d’enregistrement européen au niveau wallon, j’attire votre attention sur le fait que le numéro BCE est attaché à l’opérateur alors que le numéro d’enregistrement européen est attaché à l’hébergement. De plus, le règlement STR ne concerne ni les hôtels ni les campings. Pour ceux-ci, la génération d’un identifiant unique doit nécessairement se faire au niveau régional. De plus, l’imposition de disposer d’un numéro d’exploitation BCE comme condition d’exploitation serait contraire à la directive Services. Quoi qu’il en soit, la façon dont nous allons identifier les acteurs touristiques au sens large, mais aussi et surtout dans le système digital en construction, est effectivement cruciale.
Les équipes du CGT planchent sur la question et échangent avec leurs collègues au niveau belge afin d’élaborer la solution la plus simple pour les opérateurs et la plus fiable en termes de gestion de l’information. Dans le cadre de la réforme en cours, je souhaite maintenir l’obligation de disposition d’un numéro BCE pour accéder à l’étape facultative de la certification.
Je comprends néanmoins que ce changement entraîne des réticences, car il s’agit de changer de modèle. En effet, le code actuel interdit la gestion d’un hébergement touristique par une société alors que le futur code prévoit de l’imposer pour bénéficier de subventions publiques, mais également pour accéder à la promotion par VisitWallonia et les organismes touristiques ainsi qu’aux outils de commercialisation.
J’ai pris en compte les remarques formulées par le Conseil du tourisme. C’est pourquoi je propose une période transitoire permettant un glissement plus souple d’un système vers un autre. Durant cette période, dont la durée doit encore être soumise à l’approbation du Gouvernement, les hébergements touristiques seront certifiés avec ou sans numéro BCE. Cette proposition de modification s’inscrit en cohérence avec la modification de la taxe sur la valeur ajoutée, entrée en vigueur le 1er janvier 2022, qui soumet la location de logements meublés offrant au moins un service connexe à une TVA de 6 %. Je continue donc à soutenir ce changement.
Il est également important de rappeler, comme je le fais régulièrement lors de mes rencontres avec le secteur, que le fait d’être structuré en société ouvrira aux opérateurs concernés un droit à de nombreux avantages et un accompagnement dont ils sont actuellement exclus. Si j’ai entendu et pris en compte les craintes de certains par rapport à cette nouvelle disposition, je dois aussi entendre les acteurs, dont des gestionnaires d’hébergement du terroir, qui réclament cette nécessité de se structurer en société.
Concernant la concurrence entre les hébergements touristiques, le futur code prévoit que l’exploitation d’un hébergement touristique sans enregistrement préalable auprès de Tourisme Wallonie, qui sera le futur nom du CGT, est une infraction passible de sanctions. C’est d’ailleurs déjà le cas actuellement puisqu’un hébergement touristique ne peut être exploité sans déclaration d’exploitation préalable.
L’objectif de la mise en pratique du constat et de la sanction d’infractions par des agents est de permettre de garantir la mission de contrôle du CGT et une juste concurrence au sein du secteur. Je le rappelle, il ne s’agit pas de faire du CGT un organe sanctionnateur avant tout. Cette réforme vise à faire de l’administration un organe de conseil, d’accompagnement et de soutien à la professionnalisation des acteurs touristiques. La suppression et l’allègement de certaines tâches actuelles permettront ainsi de réorienter les missions de certains agents vers de nouvelles missions, d’où la réponse à votre question sur les moyens et les ressources humaines.
De plus, la proposition de règlement européen auquel vous faites référence, visant à favoriser la collecte statistique des locations touristiques, permettra également d’identifier les hébergements qui ne peuvent pas l’être actuellement. Il s’agira tout d’abord de les informer des conditions et des avantages de la réglementation et, s’ils ne se conforment pas à la règle, de les sanctionner. L’obligation d’obtention de permis d’urbanisme, qui vient d’être mise en application, sera également un outil dans ce cadre.
Au sujet du maintien des comités techniques, après avoir pris en compte nombre de remarques formulées par le Conseil du tourisme et d’autres instances d’avis, j’ai décidé de les maintenir moyennant certains ajustements, comme la fin de leur rôle d’avis en matière de dérogation et de recours ainsi que la fin d’une représentation au sein de la Commission sécurité incendie. Il ne s’agit pas de supprimer la possibilité d’être informé des décisions prises en matière de sécurité-incendie, mais de laisser cet avis purement technique aux experts que sont les représentants d’un service incendie.
Pour ce qui est du rôle d’avis en matière de dérogation et de recours, le traitement de ces dossiers est objectivé par l’administration et ne nécessite pas un avis des représentants des secteurs concernés. Le rôle actuel d’avis des comités techniques n’est d’ailleurs pas décisionnel. Il ne m’apparaît pas opportun de le maintenir, d’autant qu’il pourrait concerner d’éventuels collègues ou concurrents.
Enfin, au sujet des subventions et des appels à projets pour les missions de promotion touristique des maisons du tourisme, il semble effectivement qu’il y ait eu une erreur d’interprétation du texte. Ce que je propose, et ce, pour les différents secteurs, c’est la mise en place d’une double mécanique : des subventions structurelles qui sont importantes pour maintenir la prévisibilité, et la possibilité de lancer des appels à projets thématiques permettant au Gouvernement de donner une impulsion pour rencontrer les besoins spécifiques du secteur à ce moment-là ou soutenir les politiques que le Gouvernement met en œuvre.
Tout comme pour la période transitoire relative au numéro BCE, les modalités de ces appels à projets ne sont pas définies et doivent encore être soumises à l’approbation du Gouvernement. La réforme du Code wallon du tourisme poursuit son parcours sur le plan réglementaire, ensuite viendra le débat au sein du Parlement.
Je voudrais profiter de l’occasion qui m’est donnée de remercier toutes les personnes qui ont déjà pu s’exprimer et donner leur avis par rapport à cette réforme du code. Je tiens aussi à souligner l’avis du Conseil du tourisme qui dit que c’est la première fois qu’il y a une telle concertation du secteur. Cela a été dit explicitement lors de la dernière réunion du Conseil du tourisme. Je voudrais remercier toutes les personnes à cette fin et vous dire – comme déjà dit – que beaucoup de modalités doivent encore être définies, puisqu’on n’est pas encore au bout du parcours du décret. Cependant, le plus important sera les modalités définies dans les arrêtés ; nous avons là encore du pain sur la planche.
M. Di Mattia – Je vous remercie, Madame la Ministre, parce que vos propos sont rassurants par rapport au secteur qui était légitimement inquiet. Comme je vous l’ai dit dans la formulation de la question, on rentrait dans un système qui a été qualifié d’aléatoire ; je reprends ce qualificatif à mon compte.
Cependant, vous parlez d’une période transitoire, j’imagine donc que, avant les arrêtés d’exécution, on garde le système existant. C’est bien de cela qu’il s’agit ?
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