M. Di Mattia – Madame la Ministre, comme le rappelle la Fédération belge du secteur de la mobilité, il est prévu que près de 24 % du parc automobile wallon, soit environ 439 752 voitures, soit envoyé à la casse d'ici 2,5 ans dans le cadre de la lutte contre la pollution atmosphérique.
Ces chiffres soulèvent des préoccupations majeures concernant à la fois les conséquences financières pour les propriétaires de véhicules concernés et les implications pour la mobilité en Wallonie.
En vertu du décret du 17 janvier 2019 relatif à la lutte contre la pollution atmosphérique liée à la circulation des véhicules, la Wallonie est censée devenir une zone de basses émissions à partir du 1er janvier 2025. Cependant, il semble y avoir un manque de clarté et d'application effective de ce décret, ce qui suscite des interrogations quant à la mise en œuvre des mesures prévues, et donc une certaine incertitude.
Quelles mesures concrètes le Gouvernement wallon prévoit-il de prendre pour éviter qu'autant de véhicules ne soient, d'un coup, mis à la casse ?
Comment comptez-vous concilier les objectifs de lutte contre la pollution atmosphérique, auxquels nous adhérons dans notre très grande majorité, mais avec les conséquences financières potentielles pour les propriétaires des véhicules concernés ?
Pourquoi n'existe-t-il toujours pas d'arrêtés d'exécution pour mettre en œuvre les mesures prévues par le décret du 17 janvier 2019 ? Quelles actions le Gouvernement compte-t-il entreprendre pour assurer une transition harmonieuse vers une zone de basses émissions à l'entame de 2025 ?
Des incitations financières à la transition vers des véhicules plus propres ou des programmes de retrait et de recyclage sont-ils envisagés ? Comment allez-vous garantir que ces mesures soient équitables et accessibles à tous les propriétaires de véhicules concernés ?
Mme Tellier – Messieurs les Députés, s'il est vrai que, en 2021, le parc wallon comptait environ 127 000 véhicules particuliers Euro 3 et quelque 300 000 véhicules particuliers Euro 4, le nombre de véhicules impactés par l'interdiction progressive sera en réalité bien moindre, car nous tenons compte du renouvellement naturel du parc automobile dans nos projections.
Par exemple, la diminution du nombre de véhicules Euro 4 est de l'ordre de 10 % chaque année depuis 2010. Si cette tendance se maintient, fin 2025, le nombre de véhicules Euro 4 encore présents dans le parc aura déjà diminué de 35 % par rapport à 2021.
Selon les estimations des services, 0,84 % du parc automobile sera concerné par une interdiction de circulation en 2025, couvrant les véhicules sans Euronorme et d'Euronorme 1, 2 ou 3. En 2026, un nombre plus important de véhicules devrait être impacté via les normes Euro 4, correspondant à 153 800 véhicules projetés, soit 7,03 % du parc.
Il n'empêche que cette mesure, imaginée sous la précédente législature et votée par ce Parlement, doit intégrer des considérations sociales, tout d'abord, à travers certaines dérogations, qui permettent de tenir compte de situations spécifiques.
Ainsi, le décret prévoit un certain nombre de dérogations qui diminueront encore significativement le nombre de véhicules concernés. Citons les véhicules Euro 4 qui sont immatriculés avant 2019 et non cédés à des tiers, les véhicules enregistrés comme ancêtres, les véhicules parcourant moins de 3 000 kilomètres par an, les autocaravanes, les véhicules adaptés, et cetera.
Par ailleurs, comme nous l’avons déjà évoqué au sein de cette commission à plusieurs reprises, la mise en œuvre de ce décret ne peut se faire sans les mesures sociales et économiques qui l'accompagnent. C'est ce que nous avons clairement indiqué dans le PACE 2030. Ce travail est en cours et c'est une condition claire pour avancer dans cette interdiction telle qu'elle a été imaginée par mon prédécesseur.
J'en viens à la proposition de Traxio, dont j'ai pris connaissance, visant à permettre une dérogation à l'interdiction de circuler de certains véhicules à partir du moment où le véhicule aurait subi un éco-entretien. Il ne faut ici pas confondre les objectifs. Cette proposition d'éco-entretien vise avant tout à maintenir un véhicule dans la norme prévue par son homologation. Un écocontrôle du nombre de particules fines émises par les véhicules Euro 5 au minimum est donc réalisé depuis 2022 dans les centres de contrôle technique des trois Régions du pays. C'est une bonne chose, mais, pour les autres polluants et les véhicules plus anciens, l'écoentretien à lui seul n'apporte pas un bénéfice suffisant.
Nous devons donc travailler à d'autres mesures pour améliorer la qualité de l'air et assurer ainsi la santé de la population. Avec mes collègues du Gouvernement, nous dégageons chaque jour les moyens pour sortir de notre dépendance à la voiture : à travers les mesures importantes du ministre de la Mobilité, M. Henry, qui multiplie l'offre de transport public ou les infrastructures cyclables, ou encore celles du ministre l’Aménagement du territoire, M. Borsus, qui vise à éviter l'éparpillement de l'habitat. Mon objectif est que nous puissions toutes et tous vivre dans un environnement sain, en particulier dans les villes, là où la qualité de l'air est la plus dégradée à cause des polluants automobiles.
M. Di Mattia – Je voudrais, dans la réplique, rappeler que notre groupe soutient la mesure et les objectifs en matière de préservation de l'environnement et que nous vous soutenons également, Madame la Ministre, lorsque vous dites qu'il faut des conditions d'accompagnement sociales.
Vous prévoyez un certain nombre de mesures. Il me semble, à mon niveau, qu'il est aussi possible de pouvoir peser sur des mesures qui n'ont pas de coût financier, mais qui pèsent sur le temps, c'est-à-dire sur la durée d'application d'un certain nombre de mesures pour revoir le calendrier et, pour les propriétaires dont les conditions sociales sont plus précaires, leur donner davantage de temps pour rejoindre les objectifs que nous partageons tous.
L'urgence est mauvaise conseillère en la matière. Concernant les conseils de Traxio, vous y avez répondu, et je souscris pleinement à votre réponse. Je n'adhère pas du tout à l'éco-entretien tel qu'il est préconisé, mais, par contre, aux mesures sociales et aux délais supplémentaires qui permettraient de lisser dans le temps l'application de telles mesures qui sont d'une importance capitale.
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