M. Di Mattia – Madame la Ministre, selon une enquête réalisée par l'institut Vias auprès de 6 000 personnes, 7 % des Belges avouent regarder des films ou des séries au moins une fois par mois alors qu'ils conduisent leur véhicule. Ce sont deux activités qui, vous en conviendrez, sont antinomiques. Ce taux est de 8 % en Wallonie et de 16 % à Bruxelles. Bien que le taux soit moins élevé en Wallonie qu'à Bruxelles, cela reste tout de même beaucoup trop et beaucoup trop inquiétant. Des caméras intelligentes sont capables de verbaliser les conducteurs qui utilisent leur téléphone en dehors du cadre légal, mais l'emplacement choisi par les conducteurs permet d'échapper aux détecteurs de contrôle ou de surveillance.
D'après une expérience réalisée sur l'usage du GSM au volant, il apparaît que les conducteurs, lorsqu'ils ont leur GSM sous la main, consultent moins leurs rétroviseurs et effectuent notamment leurs manœuvres de manière moins adéquate. Ce comportement a donc une incidence majeure sur la conduite. Bien que, pour ce type d'infraction l'amende soit de 174 euros, les conducteurs parviennent à trouver des astuces pour ne pas se faire verbaliser en utilisant soit un support adéquat, soit en plaçant le GSM dans un endroit peu visible.
Des campagnes d'informations sont-elles prévues pour sensibiliser les conducteurs sur les risques encourus ?
Quels dispositifs mettez-vous en place pour dissuader les conducteurs d'utiliser le GSM lorsqu'ils conduisent ?
De manière plus générale, quelles mesures envisagez-vous pour que la distraction au volant soit réduite sur les routes wallonnes ?
Comment comptez-vous vous saisir de cette problématique sachant que les smartphones sont de plus en plus répandus, et ce, dès le plus jeune âge ?
Mme De Bue – Madame et Monsieur les Députés, la distraction au volant est l'une des causes principales des accidents de la route. Le phénomène plus récent de visionnage de vidéos sur les téléphones portables au volant vient considérablement accroître le danger.
Les caméras intelligentes dont vous faites état, Monsieur Di Mattia, ont été testées récemment par le Fédéral, mais j'ai cru comprendre que la validité de ce procédé, au regard de la législation en vigueur, a été contestée par l’Organe de contrôle de l'information policière. Je n'ai pas été informée par le ministre de la Mobilité, M. Gilkinet, de ses intentions en termes d'évolution législative en la matière. Madame Galant, si nous travaillons activement à la prévention en matière de distraction et en particulier d'utilisation du GSM au volant dans ce contexte évolutif, je n'ai pas, à ce stade, abordé spécifiquement cette thématique avec mes homologues des autres entités fédérées, mes compétences en la matière étant exercées au niveau de la sensibilisation. Toutefois, je ne manquerai pas de l'interpeller à ce sujet lors de notre prochaine rencontre.
Pour ce qui est de mes compétences, chaque année en concertation avec mon cabinet, l’AWSR mène des actions et des campagnes de sensibilisation aux risques et aux conséquences potentielles de la distraction au volant à destination de l’ensemble des usagers de la route. Par exemple, lors de la campagne de grande envergure réalisée en mai 2022, il s’agissait de rappeler les risques liés à l’utilisation du téléphone au volant, même lorsqu’il est fixé à la voiture. Des affiches le long des routes rappelaient que consulter son téléphone au volant équivaut à rouler quelques longues minutes sans voir la route ni les éventuels dangers qui y surgissent. La campagne a également été diffusée sur les réseaux sociaux pour sensibiliser au fait que lire un message ou consulter une notification nous déconnecte complètement de la route.
Nous préparons le lancement dans les prochaines semaines d’une large campagne de sensibilisation aux risques liés à la distraction au volant, mais également à pied, à vélo ou encore en trottinette. Visionner une vidéo en tant que piéton, cycliste ou trottinettiste recouvre, en effet, un danger tout aussi important.
Outre ces campagnes de sensibilisation, cette problématique est régulièrement abordée via les différents canaux de communication habituellement utilisés par l’AWSR, ainsi que via des communications dans la presse. La Journée mondiale sans téléphone portable organisée le 6 février dernier a permis de réaliser un nouveau focus sur cette problématique. À cette occasion, l’AWSR a publié les résultats d’une étude et diffusé des conseils, via son site, ses réseaux sociaux et divers médias, pour ne pas se laisser distraire au volant.
Permettez-moi également de vous informer ou de rappeler que la nouvelle réglementation concernant le téléphone au volant, entrée en vigueur en mars 2022, prévoit que le téléphone, pour pouvoir être utilisé en conduisant, doit être placé dans un support prévu à cet effet. Cela permet par exemple d’utiliser un GPS sur son smartphone en conduisant. Cependant, même si l’appareil est disposé de manière réglementaire dans la voiture, un conducteur pourra être verbalisé s’il est constaté qu’il entraîne un comportement dangereux – par exemple des zigzags –, parce que le conducteur regarde une vidéo ou se prend en photo tout en conduisant.
Cette modification de la réglementation intervenue en 2022 et les contrôles de police représentent donc des éléments permettant de lutter contre ce type de comportement. Chaque année, la police fédérale de la route organise d’ailleurs deux « marathons de l’attention au volant », des actions nationales visant à lutter contre tous les types de distraction au volant. Le but est de sensibiliser les usagers sur les dangers de l’usage du GSM et sur les autres formes de distraction au volant.
Dans ses communications, l’AWSR encourage également les usagers à ne téléphoner en kit « mains libres » qu’en cas d’urgence et à activer le mode « ne pas déranger » avant de prendre la route. Disponible aujourd’hui sur la plupart des smartphones, cette fonction permet d’envoyer un message automatique indiquant à son interlocuteur que l’on est au volant. C’est facile, utile et pratique pour éviter d’utiliser son téléphone en conduisant.
Rappelons qu’une étude de l’AWSR révèle que 27 % des conducteurs wallons qui reconnaissant utiliser leur téléphone au volant connaissent ce type d’application, mais seuls 5 % déclarent en faire usage. C’est pourtant un dispositif important pour s’assurer de n’être connecté à rien d’autre que la route.
Enfin, l’AWSR propose également un module de formation spécifique sur la distraction au volant, en ce compris les dangers du visionnage de vidéos. Ce dernier s’adresse aux entreprises, communes ou associations. Il s’agit d’une formation interactive lors de laquelle les participants sont notamment invités à réaliser des exercices pratiques pour expérimenter l’impact de la distraction sur l’attention et la difficulté de faire deux choses en même temps. Des solutions sont ensuite proposées pour ne pas se laisser distraire au volant.
M. Di Mattia – Je remercie Mme la Ministre parce que c’était très intéressant.
Madame la Ministre, vous me permettrez ce commentaire qui dépasse le cadre strictement politique : à quoi fait-on référence ? Si l’on fait référence à des comportements extrêmes, comme un certain nombre de drames récents ont pu avoir lieu, c’est une chose. Ici, on parle de comportements qui deviennent habituels. Cela devient la norme, cela devient des accoutumances, des choses qui sont le fait de tout un chacun, de personnes de toutes générations, de tous milieux. Ce que je vous invite à faire, si vous me le permettez – je n'ai pas de conseils à vous donner, mais je le fais tout de même –, c'est de pouvoir interpeller votre homologue au niveau du Fédéral et de solliciter un état des lieux de mesures à venir, tant aujourd'hui que dans le futur, les prochaines majorités, pour faire en sorte que le dernier dispositif dont vous avez parlé qui est efficace, mais qu'il y aura d'autres alternatives qui permettront de contourner. C'est un phénomène de société vis-à-vis duquel il faudra être vigilant.
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