M. Di Mattia – Madame la Ministre, Europa Nostra et l’Institut de la Banque européenne d’investissement viennent d’annoncer la présélection des ruines du palais de Charles de Lorraine à Mariemont, important lieu de mémoire du XVIe siècle, comme l’un des sites européens en péril à sauvegarder et à valoriser.
Mariemont, domaine de 45 hectares, est classé comme site exceptionnel par la Wallonie, mais les ruines qui servaient jadis à exposer des collections archéologiques sous la forme d’un musée en plein air menacent aujourd’hui de s’effondrer. Interrogés sur la problématique, les services régionaux ont indiqué miser sur la visibilité accordée par Europa Nostra pour rappeler la valeur historique du site au niveau européen et générer des opportunités de financement complémentaires pour la sauvegarde et la mise en valeur des ruines.
Quels effets cette nomination pourrait-elle avoir sur le plan de stabilisation et sur la stratégie de mécénat privé du site ? Avez-vous chargé l’AWaP d’un monitoring des ruines dont l’accès est interdit pour des raisons de sécurité ?
Si les ruines du château venaient à ne pas être sélectionnées par Europa Nostra, quelles mesures alternatives envisagez-vous de demander à l’AWaP pour sauvegarder et revaloriser ce joyau de l’histoire wallonne ? Plus largement, présenterez-vous au Gouvernement une stratégie en vue de faciliter le mécénat privé du patrimoine dans la réforme du CoPat ? Si ce n’est pas le cas, merci de nous éclairer sur les alternatives.
Mme De Bue – Monsieur le Député, le domaine de Mariemont est une propriété de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Cette dernière mène donc les projets y afférents. Je vous invite à vous tourner vers la ministre de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles sur ce sujet, comme vous l’avez déjà fait.
Néanmoins, Mariemont étant classé comme site et reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie, l’AWaP est étroitement associée aux projets qui s’y développent et je peux vous apporter des précisions en lien avec le patrimoine. En ce qui concerne la gestion du domaine, un accord de coopération lie depuis 2009 la Fédération Wallonie-Bruxelles, propriétaire, et la Région wallonne via le SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement. D’autres administrations régionales y sont aussi parties prenantes, comme le CGT pour la valorisation touristique et l’AWaP pour les questions liées au patrimoine culturel immobilier.
Actuellement, la Fédération Wallonie-Bruxelles travaille avec le SPW ARNE à la désignation d’une équipe d’auteurs de projet pour établir un schéma directeur pour la revitalisation de ce site. Dans ce cadre, j’ai fait part de mon souhait que cette équipe comprenne un spécialiste du patrimoine immobilier.
Le palais de Charles-Alexandre de Lorraine, quant à lui, a été construit dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Fortement endommagé au cours des événements révolutionnaires, il est en ruine depuis lors. Actuellement inaccessible au public, il fait l’objet d’attention de la part des différentes parties concernées. Ainsi, un comité, réunissant des experts de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de l’AWaP et du musée de Mariemont, se consacre au suivi des ruines et plus précisément aux actions à entreprendre pour traiter les problèmes liés à la stabilité et à la végétation invasive.
Au regard de l’état de dégradation des vestiges et du potentiel archéologique de la zone, une action en deux temps est envisagée : la stabilisation provisoire à court terme et puis la consolidation définitive. Les dernières réunions de travail à ce propos remontent à fin novembre 2022 et début février dernier. C'est donc récent. À cette dernière participaient des représentants de Buildwise, anciennement connu sous le nom de Centre scientifique et technique de la construction. Buildwise a confirmé son intérêt à participer au projet dans le cadre d’un mécénat de compétences, ce dont je me réjouis.
En ce qui concerne le mécénat privé, il ne s’agit pas d’une matière à réglementer via le Code du patrimoine ; lequel permet de combiner subventions patrimoniales et autres apports publics ou privés. Il convient plutôt d’encourager cette pratique via d’autres biais. Je pense ainsi à la mise en relation des porteurs de projets avec les possibilités offertes par les fonds existants ou les possibilités de collectes via la Fondation Roi Baudouin ou encore l’action de l’ASBL Qualité-Village-Wallonie ou Prométhéa, qui œuvrent au développement de mécénat et que je soutiens d’ailleurs au travers de subsides de fonctionnement octroyés par l’Agence wallonne du patrimoine. À Mariemont, le rapprochement avec Buildwise s’est d’ailleurs fait avec le concours de l’ASBL Prométhéa.
Je poursuis également d’autres pistes, comme le recentrage sur des projets de moindre ampleur relatifs au patrimoine local, dont la temporalité s’accorde mieux avec les exigences d’éventuels mécènes. Pour les projets de plus grande ampleur, les freins ne sont pas à trouver dans le Code du patrimoine, mais plutôt dans la temporalité et dans le manque d’incitants fiscaux. À cet égard, des leviers sont à actionner à d’autres niveaux de pouvoir. Je pense particulièrement au niveau fédéral.
Pour conclure, je vous confirme que l’AWaP est pleinement associée aux diverses discussions et réunions. Ce travail se poursuivra indépendamment du contenu final de la liste d’Europa Nostra. Cette inscription est un incitant de plus à travailler de concert sur la revitalisation de ce domaine dont l’intérêt culturel, naturel, patrimonial et touristique n’est plus à démontrer.
M. Di Mattia – Je vous remercie, Madame la Ministre. Votre réponse est parfaitement claire.
S’agissant du mécénat, je n’y reviendrai pas. Ma question visait à la facilitation, pas forcément une révision du code. Là, vous avez donné les pistes qui s’avèrent les plus pertinentes.
Mon propos avait trait à la dimension patrimoniale dans un domaine qui remonte au XVIe siècle et pour un château qui, lui, remonte au XVIIIe, mais dont l’état de dégradation est tel que la dimension patrimoniale doit être absolument assurée. Le fait que vous ayez imposé un expert en matière de patrimoine immobilier me semble absolument rassurant dans cette problématique.
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