M. Di Mattia – Madame la Ministre, dans le cadre de la fiche 184 du Plan de relance, un appel à projets de 4 millions d'euros a été lancé à destination des villes et communes wallonnes pour renforcer l'offre d'aires publiques pour l'accueil des motor-homes. Sur 14 dossiers jugés recevables et analysés par le Comité d'évaluation, 11 ont finalement été retenus par le Gouvernement.
Parmi les dossiers de candidature introduits figurait celui de la Ville de La Louvière qui espérait obtenir une subvention de 350 000 euros pour financer l'installation d'une aire de motor-homes dans un cadre singulier, à savoir au pied de l'ascenseur de Strépy-Thieu. Un dossier complexe qui conjugue des contraintes patrimoniales et un actuel défaut de propriété, les parcelles étant encore détenues par le SPW.
À la lecture du rapport du comité d’évaluation, nous apprenons que les agents traitants du CGT avaient jugé le projet irrecevable, la Ville ne disposant pas du droit réel sur ces parcelles. Le comité d’évaluation s’est fié à cet avis pour justifier que le projet ne remplissait pas l’ensemble des conditions de recevabilité de l’appel à projets. Cette annonce a été une grande déception pour les autorités louviéroises, ou plus largement de la Région, qui nourrissaient de grands espoirs de voir ce projet se concrétiser.
Au regard de la qualité du dossier, quelle piste serait envisageable pour que l’engagement de concession puisse devenir suffisant et permettre de concrétiser ce projet de création d’une aire de motor-homes à Strépy-Thieu via une autre forme de subsidiation ?
Que pouvez-vous mettre en œuvre pour accélérer le processus de cession des droits de propriété ?
Par ailleurs, à ce stade, l’AWaP devrait avoir reçu un plan précis de l’implantation projetée de l’aire pour motor-homes et les modalités y afférentes. Quand l’agence serait-elle en mesure de confirmer un avis de faisabilité au regard des prescrits du Code du patrimoine ?
Mme De Bue – Monsieur le Député, le comité d’évaluation s’est en effet fié à l’avis préalable de l’administration, mais a eu le loisir de s’en écarter. Il s’agissait d’une analyse technique préalable, mais chaque membre du comité disposait des dossiers préalablement à la tenue de la réunion de sélection.
Pour rappel, ce comité était composé d’un représentant de mon cabinet, d’un représentant du ministre des Pouvoirs locaux, de deux représentants de la Direction des attractions et infrastructures touristiques et infrastructures du CGT, d’un représentant de l’ASBL ABUM, c’est-à-dire l’Association belge d’utilisateurs de motor-homes, et d’un représentant de la Ligue francophone belge des clubs de motor-homes. Le comité a tout à fait logiquement décidé d’écarter les dossiers de manière égale et équitable. Ce fut le cas pour ce dossier dont les critères de recevabilité n’étaient pas respectés. La décision de ne pas analyser le dossier faute de complétude de celui-ci a donc été collégiale.
Néanmoins, je comprends tout à fait la déception des porteurs de projet, mais la Ville de La Louvière n’est pas le seul porteur déçu. Je ne vois donc absolument pas pourquoi octroyer une dérogation à un opérateur et pas à un autre. Vous conviendrez par ailleurs qu’une telle option entraînerait de potentiels recours tout à fait compréhensibles de la part des autres porteurs de projet et que, dans une situation inverse, la Ville de La Louvière aurait elle-même entamé un recours.
Le dossier auquel vous faites référence est très certainement de qualité, mais il ne respectait malheureusement pas le règlement de l’appel à projets. Sachez que je suis moi-même navrée, voire agacée, qu’un certain nombre de dossiers, certes de qualité, aient dû être écartés. Cependant, tout appel à projets ou action publique, quelle qu’elle soit, impose l’équité dans le traitement des dossiers. L’irrecevabilité des concessions est liée à la base réglementaire des subventions qui restent la réglementation des équipements touristiques de 1969. Dans un contexte où les intervenants sont tous des acteurs publics, cette problématique m’interpelle également.
Je regrette fortement cette situation, et ce sera un point d’attention dans la réforme du Code du tourisme en cours, qui intègre les subventions en équipement et qui font déjà l’objet de plusieurs remarques de la Cour des comptes et de l’Inspection des finances, mais que mes prédécesseurs n’ont jamais souhaité réformer.
À court terme, mon cabinet va travailler avec le CGT et consulter l’Inspection des finances afin d’envisager dès à présent une solution pour ces concessions entre acteurs de service public. Quand j’entends que c’est le SPW Mobilité et Infrastructures qui est propriétaire, que l’on est entre acteurs publics et que l’on ne parvient pas à une solution, je vous avoue aussi que cela m’agace.
On essaie alors de trouver une solution à ce moment-là, ou alors, à court terme, il faudrait envisager une prise de droits réels par la commune sur le site. Je parle du court terme, Monsieur Di Mattia.
Quoi qu’il en soit, par rapport aux subventions, la Ville a toujours le loisir d’introduire sa demande de subvention auprès du CGT dans le cadre du schéma d’implantation d’aires pour motor-homes. Je rappelle tout de même qu’il existe également des conditions auxquelles il faut satisfaire.
En ce qui concerne l’AWaP, celle-ci avait déjà rendu un avis favorable préalable dans le cadre de l’introduction de ce dossier. Dès réception d’une demande de réunion de patrimoine de la part du demandeur, les conditions de mise en œuvre du projet pourront être établies.
Voilà ce que je peux vous dire à ce stade : soit une solution à court terme, soit c’est dans le cadre de la réforme du Code.
M. Di Mattia – Je voudrais vraiment vous remercier, Madame la Ministre. Votre réponse me semble dictée par le bon sens. Effectivement, il y a du court terme, d'une part, et une solution à trouver de manière structurelle qu'aucun de vos prédécesseurs n'a trouvée, d’autre part.
Lorsque vous vous dites agacée, je partage votre sentiment. Je suis à la fois circonspect et stupéfait qu’une solution n'ait pu être trouvée entre les acteurs publics. Je ne me fais pas le défenseur d'un sousrégionalisme quelconque, je me place au-delà. Ma question se voulait provocatrice à dessein, mais votre réponse me convient parfaitement. Il y a la piste à court terme de cette autre solution pour introduire le dossier et tout de même obtenir une autorisation, car j'ai la faiblesse de penser que ce dossier est de qualité. Vous l'avez souligné également. D'autres sont peut-être de qualité, mais il y a une double peine lorsqu'on se trouve dans une telle situation, qui est inextricable.
Vous dites que la Ville pourrait prendre les droits de propriété réelle, mais, techniquement, sur un plan purement juridique, cela n'est pas simple du tout. J'espère donc que le Code, à la révision duquel vous êtes appliquée, pourra répondre à ce genre de question.
Cette problématique va se retrouver dans d'autres cas. Lorsque des opérateurs se renverront la balle et que nous nous retrouverons avec des dossiers de qualité arrivant dans une impasse – que ce soit La Louvière, Jodoigne ou Liège –, cela sera tout à fait dommageable. Si nous pouvions apporter une solution structurelle à cette problématique, cela serait appréciable.
Je vous remercie déjà pour votre bonne volonté.
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